Page:Londres - Au bagne.djvu/98

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L’évasion, leur seul espoir, est difficile. Il y faut du courage. Aussi les compte-t-on. Dieudonné, de la bande à Bonnot, est parti sur deux troncs de bananiers par une mer terrible, requins à la surface. Le courant mit trois jours pour l’apporter sur la Grande Terre. Il marcha vers le Venezuela, mais ne connaissant pas la route, tomba dans le camp Charvein. Il se jeta lui-même dans le piège, tête baissée.

— Mais Dieudonné est un homme ! fait remarquer le commandant Masse.

La fin qui les attend en épouvante plus d’un. On n’enterre pas, on immerge, aux îles. Autrefois, on sonnait une cloche. On ne sonne plus ; les requins connaissaient ce signal et accouraient, dit-on. Ils accourent toujours. Le cadavre ne flotte pas longtemps et, comme chante à peu près le même Dieudonné :


Déjà les vieux requins sont là,
Ils ont senti le corps de l’homme.
L’un croque un bras comme une pomme,
L’autre le tronc… et tra-la-la !
C’est au plus vif, au plus adroit.
Adieu, bagnard ! Vive le droit.



Nous partons pour Saint-Joseph. Huit heures du matin. Les canotiers ont revêtu leur plus belle camisole empesée.