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CHEZ LES FOUS

femme casquée d’un bonnet d’aviateur, camisolée, ficelée sur le lit, bavait de fureur en criant entre deux nausées :

— Mouge, mouge, mouge !

C’était une Arménienne. Contons son histoire.

Son mari, comme tout Arménien qui connaît son devoir, était parti pour les Amériques. Fortune faite, il envoya des dollars à son Arménienne et lui dit :

— Viens me retrouver.

L’Arménienne boucle sa malle de fer-blanc ; en route ! Traverse la Méditerranée, Marseille, brûle Paris, atteint Cherbourg. À Cherbourg, elle perd son sac. Elle n’a plus d’argent. On la refuse au bateau. Premier désespoir. L’Arménienne tombe alors sur des flibustiers qui désirent la consoler, elle les suit à Paris. Les flibustiers lui volent l’honneur. Elle a tout perdu. Dans son malheur elle veut se rapprocher de son Arménie et part pour la côte. Elle arrive, elle loue une chambre au deuxième étage et se jette par la fenêtre. Elle ne s’est pas tuée. Elle arrache ses vêtements, elle court par la ville : l’étrangère est folle.

En arrivant à l’asile, elle répétait, s’il faut en croire l’interprète : « Qu’ai-je fait à mon mari, à