Page:Londres - L’Homme qui s’évada, 1928.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mon évasion était décidée.

… L’évasion, c’est le risque. Là-bas, les derniers temps, vous étiez privilégié.

— Privilégié, parmi les forçats, beau privilège ! Voyez-vous, je ne me suis jamais plu au bagne, même dans un bagne amélioré. Guillaume Tell fut le héros de mon enfance. Ma fable aimée était Le chien et le loup. Non ! Non ! Plus de bagne, plus de casaque, plus de matricule.

Évidemment, je n’étais pas mal depuis quinze mois. J’avais un laissez-passer, je couchais en ville. La police, me rencontrant après l’heure fixée, faisait celle de ne pas me voir. Je gagnais mon pain parce que j’étais de ces exceptions qui peuvent travailler en Guyane : mécaniciens, ébénistes. Seulement, vous le savez bien, ce n’est pas une vie de vivre à Cayenne, pour celui qui a porté le petit chapeau. On a toujours la marque là — et il frappa son front — vous ne la voyez pas, vous, mais, là-bas, les négriots eux-mêmes