nous entourèrent. Les deux bourgeois du lieu : un meunier, un patron scieur de long, eux sans papillotes et vêtus à l’européenne, vinrent nous saluer au nom de la communauté.
— Ils croient, nous dirent-ils, que vous leur apportez de l’argent.
— Ils souffrent tous de la faim, dis-je.
— Ils ont toujours souffert de la faim.
— Comment ne meurent-ils pas ?
— Israël est dur !
— Alors, qu’ils aillent plus loin !
— C’est plus terrible encore.
— Qu’ils gagnent les villes !
— Dans cette tenue ? avec ces habits ? sans un sou ? La misère les cloue ici.
— Et la Palestine ?
— Le Messie n’est pas encore venu.
— Franchement, l’attendent-ils ?
— Mais oui, Monsieur, nous l’attendons !
Les bavardages cessèrent. On étouffa le feu des cigarettes. Un chanteur entonna un verset sacré. Le regard extasié de ces Juifs creux monta vers l’armoire à Thora. Qu’importait la misère ou logis ? Le trésor était là !