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LE CHEMIN DE BUENOS-AIRES

nous fit crédit, il avait confiance dans la petite, il la jugeait sérieuse.

Je rôdai dans les cafés que l’on m’avait signalés. Une après-midi j’entendis quelqu’un dire à côté de moi : je dois voir Petit-Rouge, ce soir. Je le connais aussi, je dis. Je serais heureux de le rencontrer. Moi j’arrive et je suis à la traîne.

Il m’amena chez Petit-Rouge. — Comment qu’elle est ta femme ? qu’il me demande. — Comme ça, boulotte, entre les deux, quoi ! — Eh bien ! on va la monter à Mendoza ! — Où c’est çà ? — À la frontière du Chili. — Ah ! que c’est loin ! — Ah ! tais toi ! — As-tu des draps, des couvertures ? — Alors, ici, dis-je, il ne suffit pas de donner sa femme, il faut aussi prêter sa literie ?

On prit le train le surlendemain. Petit-Rouge avait fait les fonds. Et nous voilà pendant deux jours à traverser des pampas. C’étaient des paysages qui n’étaient pas de notre religion. Cela vous serrait le cœur. Mon petit homme, me disait la gosse, tu ne vas pas me livrer à des sauvages, tu sais, moi je t’aime bien. J’eus le malheur de parler d’Indiens. Quand elle sut qu’on se promenait parmi des Indiens, elle se jeta à mes genoux. C’est comme je vous le dis. Je ne m’étais jamais aperçu jusqu’à ce jour qu’elle avait des genoux ! Ça me fit quelque chose. Les Indiens, que je lui dis, ça n’habite