Je cheminai toujours comme je pus ; je n’avais à craindre, dans cette partie, aucun précipice ; à l’aide de ma canne, j’assurais mes pas et m’ouvrais un passage. Après avoir voyagé ainsi, durant près d’une heure, j’aperçus une lumière à une distance qui ne me parut pas fort éloignée. Je jugeai que j’étais à la limite des bois. L’espérance, soudain, rentra dans mon âme. Je tâchai de me diriger vers cette lumière. Vingt fois je la perdis de vue, et vingt fois elle reparut à mes yeux. Cependant, je précipitais ma marche autant que je le pouvais. Enfin, je me trouvai hors des bois ; je commençais à respirer. La nuit n’était point obscure et du moins j’y voyais assez pour me conduire. J’étais dans une espèce de ravin ; je gravis la hauteur opposée et, en revoyant la lumière chérie qui guidait mes pas, je m’aperçus que j’avais encore une certaine distance à franchir pour l’atteindre ; je craignais que les habitants ne se couchassent et qu’ainsi je ne la perdisse pour toujours, ce qui m’aurait fort contrarié. Cette pensée occupait mon esprit quand, d’une espèce de hallier que j’avais à ma droite, une grosse voix me salua par ces mots : « Bonjou, mouché ; » mon premier mouvement fut celui de la peur ou plutôt de la surprise. Comme je me doutais que ce ne pouvait être qu’un nègre marron, je répondis à son bonjour ; je lui
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