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célébrer le mien avec vous. — Daignez du moins compatir à ma peine. Adieu.

La Duchesse.

Je vous salue, monseigneur.

Theodora, à part.

Dieu sait combien peu elle est charmée de vous voir, et qu’un autre a les clefs de son cœur, et que vous n’y trouverez pas entrée.

Le Roi.

Adieu, Celia.

La Duchesse.

Monseigneur…

Theodora, à part.

Il a bien de la peine à prendre congé d’elle, tandis qu’elle, au contraire, elle voudrait le voir bien loin.

Le Roi.

Adieu, belle Celia, Celia de mon âme !

Le Roi sort.
La Duchesse.

Ah ! Theodora, quelle disgrâce !

Theodora.

Je la sens vivement, madame, et je tremble. Le roi n’est occupé que de vous. Vainement vous aimez le comte et il vous aime ; il vous faudra renoncer à lui.

La Duchesse.

Moi, que je renonce au comte ! jamais. Non, avant que son image adorée s’efface de mon cœur, avant que je le trahisse pour un autre, l’on verra le soleil se voiler d’un crêpe funèbre au milieu du jour, le Douro et le Tage remonter vers leur source, et toute la nature bouleversée se confondre. Non, jamais je n’oublierai, jamais je ne trahirai le comte pour un autre ; et si le roi persiste à demander ma main et qu’il l’obtienne, Theodora, je saurai mourir.


Entrent L’INFANT et LE COMTE ; l’infant porte un sac de farine sur le dos.
Le Comte.

N’ayez pas peur, Pascal, que la duchesse se fâche. Je ne suis pas mal avec elle.

L’Infant.

Par l’enfer ! comme il pèse ! Que le diable emporte ce sac !

Il jette le sac par terre.
La Duchesse.

Qu’y a-t-il donc ?