Que faire ? Dois-je laisser Ongol pour ce dieu étranger ? Dois-je laisser le soleil, la lune, les étoiles, pour ce Dieu homme, pour ce Dieu espagnol ? Dois-je cesser d’adorer leur lumière pour adorer cette croix de bois sur laquelle leur Dieu est mort ? — Il le faut : car si je ne faisais pas comme ils veulent, ils pourraient bien me tuer ; et je dois me soumettre, quoique l’on doive chercher Dieu par amour et non par crainte. — Ah ! combien il est difficile de renoncer à son antique foi… Mais si Ongol n’est qu’un ange rebelle, et si le Christ est ce Dieu puissant qui châtia sa rébellion, il vaut mieux suivre le Christ.
Arrête, Dulcan ; où vas-tu ?
Qui es-tu ?
Ton dieu.
Pourquoi m’empêcher de sortir ?
Pour que tu n’ailles point là-bas ?
Je ne puis t’écouter : je l’ai promis.
Je te tuerai.
J’espère que non.
Alors où vas-tu ?
À la messe.
Insensé, qui crois à cette feinte amitié ! Ne vois-tu pas que ces hommes, sous prétexte de religion, viennent ici prendre ton or, et qu’ils feignent de travailler à l’établissement du christianisme jusqu’à ce que d’autres les remplacent, qui achèvent de t’enlever toutes tes richesses ? — Car voilà que Colomb arrive en Espagne.
Alors, Ongol, dis-moi, à quoi verrai-je que ces gens-là me trompent ?
À ce que le Soleil vient de voiler sa face pour ne pas être témoin de ton abandon. — Et puis, écoute. Ce perfide Rodrigue qui se dit ton ami, c’est lui qui t’a enlevé Tacuana. Il prétend qu’un autre