Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/81

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teurs invoquant la prescription (217) ; que (218), dans bien des endroits, ils n’étaient jamais payés en argent (219), mais que chaque famille mettait de côté ce qu’elle avait de plus mauvais dans sa récolte (220), pour donner à l’instituteur, quand il viendrait le dimanche mendier à chaque porte la besace sur le dos (221). Nous disons que l’instituteur n’était pas toujours bien venu à réclamer dans un ménage son petit lot de pommes de terre, parce qu’il faisait tort aux pourceaux (222).

Est-ce l’abjection où les maîtres se voyaient réduits qui avait fini par les rendre dignes de leur misère ? Est-ce leur immoralité, qui avait appelé sur eux le mépris ? Il nous serait bien difficile à présent de décider lequel eut le premier tort dans la querelle, et nous sommes porté à croire qu’il existait entre ces deux malheurs une réciprocité nécessaire. Un état méprisé ne peut guère tenter des gens qui s’honorent : et des hommes vicieux ne sont pas faits pour réhabiliter le métier auquel ils se vouent. Cependant, lorsque nous considérons que, malgré son ignorance, l’instituteur devant trouver dans le degré d’instruction qu’il possédait, le fruit nécessaire de toute culture de l’intelligence, était naturellement disposé à des sentiments meilleurs ; lorsque nous voyons surtout, depuis la loi et malgré la loi, toutes les intrigues et les prévarications tentées par les communes et leurs magistrats pour empêcher l’instituteur de leurs enfants de remonter à sa place, et d’occuper le rang qui lui est dû ; nous ne pouvons nous empêcher de prononcer que le principe du mal était dans cette dépendance, dans cette misère, dans cette vie d’humiliation et de dégoût, à laquelle l’avarice, l’envie, toutes les mauvaises passions des campagnes avaient condamné le maître d’école.

En effet, aujourd’hui même que, pour leur assurer une