Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/25

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occupe peu, en général, l’imagination d’un enfant ; le souvenir de son parfum, par exemple, un parfum pénétrant et doux, où il y avait de l’iris et du jasmin, et qui montait d’elle, dès qu’on se rapprochait, comme quand on passe en juin contre la haie d’un jardin en fleurs : ce parfum entêtant et suave, tous ses vêtements en étaient imprégnés, et, longtemps après sa sortie de l’église, le bas de la nef, où elle entendait la messe auprès de nous, en gardait persistant derrière elle le sillage embaumé.

Ce parfum, tenace obsession, je le respirais toute la journée du dimanche dans ma chambre, au salon, à table, où la subtile effluve me parlait encore d’elle, et, les narines voluptueusement ouvertes, je n’avais qu’à fermer les yeux en le respirant pour revoir aussitôt son délicat profil aristocrate et cette fine pâleur ombrée d’un bandeau blond sous sa capote de peluche violette.

La petite fille aux grands cheveux couleur de seigle mûr, qui gambadait, le jour de notre première rencontre, suspendue à la main de lord Mordaunt, l’accompagnait toutes les fois à l’église : pauvre enfant craintive et comme dépaysée dans