Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/41

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rue Viorne, devant la grille même de Sonyeuse où nous ne manquions pas de nous arrêter.

Le pavillon dressait toujours au fond de la grande allée de marronniers sa silhouette à toits élevés, guillochés de lucarnes ; les lourds entablements de pierre se détachaient même plus blancs qu’autrefois sur la rouille des briques, aujourd’hui soigneusement lavées, mais Sonyeuse n’en gardait pas moins son aspect de pavillon dormant au milieu de ses pelouses et de ses grands ombrages immobiles, comme ensommeillés, eux aussi, dans un séculaire oubli : au loin, la fuyante vallée ; et il semblait d’autant plus dormir, ce mélancolique domaine de Sonyeuse, dont le nom revient à chaque instant au bout de ma plume avec le glas d’une obsession, que tout occupé qu’il fût maintenant par ces Anglais indéchiffrables, les persiennes en étaient hermétiquement closes, du côté de la rue du moins ; les Mordaunt habitaient les appartements donnant sur la vallée ; il y avait même chez ces Anglais un tel besoin de se retrancher tout vivants du monde et de vivre cachés à tous les yeux, qu’ils avaient fait refaire à neuf les an-