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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/78

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un squelette de femme habitait bien ce cercueil, mais un squelette décapité, une armature sans tête aux ossements blanchis qui à peine mis au contact de l’air, devinrent poussière et tombèrent en cendre.

Quelle main sacrilège avait osé mutiler ce cadavre et reprendre à la tombe cette belle tête expressive et si pâle dans l’or fluide et lourd de ses cheveux ?

De leur vivant ces beaux yeux douloureux d’un bleu noir et limpide, ces deux larges prunelles égarées, comme hagardes, fixaient-ils déjà d’un regard visionnaire l’horrible mutilation que cette adorable tête devait subir après la mort ?

Dans le pays tous ceux qui se rappelaient avoir connu lord et lady Mordaunt, ne mirent pas une seule minute en doute que le corps n’eût été mis en bière, décapité. Le visage sinistre et passionné, le regard d’onyx, aigu et froid, qu’étaient lord Archibald Mordaunt, autorisaient toutes les hypothèses. — « Cet homme me fait peur, disait souvent ma mère. » Je comprenais maintenant le