Page:Lorrain - Buveurs d’âmes, 1893.djvu/123

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tête, l’œil ébloui dans cette seconde d’obscurité.

Toute blanche dans le noir, toute nue dans l’ouragan, la jeune femme, les coudes à la rampe, faisait face à la mer, tout entière à la bataille des vagues se ruant forcenées à l’assaut des falaises et hurlant en tempête.

Encore une nouvelle fantaisie. Lacroix-Larive, avec un haussement d’épaules, avait sonné, demandé une fourrure, et, la pelisse de loutre apportée, en avait silencieusement enveloppé les frissonnantes épaules de la jeune femme.

Elle l’avait laissé faire sans un mot, sans un regard, l’âme et les yeux ailleurs, et, maintenant que les quatre hommes rapprochés du balcon, le collet de leur smoking relevé, l’entouraient en causant avec le point de feu dans la nuit de leurs quatre cigarettes, elle, sans tourner la tête et avec un geste frileux qui ramenait sa pelisse autour de son cou, détachait simplement de sa voix blanche et nette :

— Oui, c’est vraiment superbe, n’est-ce pas ?

En effet, la lune, qui venait d’apparaître derrière un écroulement de nuées, baignait d’une lueur de rêve la lutte exaspérée des rafales et des lames ; mêlée pleine de sanglots et de râles,