Page:Lorrain - Buveurs d’âmes, 1893.djvu/266

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le valet d’une fille ; c’est une chaîne, quoique dorée, mais patience, elle approche, l’époque de la délivrance.

Comment le retrouvait-on, en dix-huit-cent quatre-vingt-sept, installé à Tunis, à la villa Ibrahim, à deux cents mètres du Bardo, avec charge à la cour et titre de chef des écuries du bey ? Autre histoire. Il y a neuf ans, Liline Oysette, une des habituées de la rue Saint-Georges, petite acteuse blonde aux jolies épaules alors un peu maigres (elles se sont rembourrées depuis), Liline Oysette, lasse un beau soir de jouer des pannes aux Folies-Esthétiques et de gagner à la rougeur de son front trente misérables louis par mois dans l’astiquage des vieux marèvaudis, s’engageait dans une troupe en partance pour Tunis et du train P.-L.-M., s’embarquait à Marseille pour débarquer à la Goulette, décidée, dans sa petite cervelle de cabotine, à faire le Bey, le vieux Bey de Tunis en personne, Ali-Bey.

Et elle le faisait, comme elle l’avait dit, Liline Oysette. Toute maigrichonne qu’elle fût, elle devint la maîtresse de ce vieux barbaresque ; mais avec son flair de Parisienne elle ne fut pas longtemps à se rendre compte qu’elle n’é-