Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/100

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méridionales qui égayent si bien les vieux murs ; mais parmi les pierres, quelques plantes qu’on n’y avait pas mises : les mousses, les fougères et les tristes digitales roses, amies de ce granit breton… Et quelque chose d’eux-mêmes était déjà resté dans cet entour ; ce qu’ils aimaient, ce n’était pas ce lieu, mais c’était l’antérieur de leur propre durée qui déjà l’avait, pour ainsi dire, imprégné, — surtout l’antérieur de leur mutuelle tendresse, destinée à finir et à être oubliée…

Un des grands leurres de la vie, de tenir ainsi aux choses presque autant qu’aux êtres, — qui, il est vrai, durent encore moins qu’elles. L’attachement à des lieux, à des reliques, ou bien à des traditions et à des souvenirs, n’est vraiment qu’une forme cultivée, une forme adaptée à notre plus grande clairvoyance humaine, de l’universel sentiment de la conservation. Les bêtes se contentent de fuir ou de se défendre contre la mort, quand elle leur apparaît immédiate et violente, mais elles n’imaginent rien contre le temps qui les use. Nous, qui allons sans doute à la