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Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/164

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particulièrement éphémère semblait être mêlé à l’essence même de leur amour ; de confuses menaces de fin, et de mort, et d’oubli, planaient au-dessus.

Jean, habitué, lui, à de plus gais printemps, dans sa Provence de lumière, recevait une étrange impression de cet avril frissonnant sans soleil, de cette verdure trop fraîche, sous ce ciel trop noir — où l’Océan proche envoyait ses brises et ses grands nuages. — Cette étape, dans cette petite ville morne, lui rappelait, par certains côtés de calme, son séjour à Rhodes et les soirées où descendait pour lui, aux mêmes heures de pénombre et par des rues également blanches, une jeune fille grecque. Mais à présent la mélancolie était différente, plus grise et surtout plus mêlée d’amour, infiniment plus mêlée d’amour. Il sentait un envahissement de lui-même encore inconnu, et il s’y abandonnait avec son irréflexion d’enfant. Où allait-il ? Qu’est-ce qu’il lui voulait, à cette petite Madeleine ? Il ne le savait guère. Dès le second soir, il avait compris, rien qu’à sa confiance absolue et à sa façon de