Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/166

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un de ces arbres, pour la voir s’éloigner, tourner, et disparaître, dans la rue ouvrière, plus populeuse et plus remuante, où elle habitait. Elle était jolie, même vue ainsi, par derrière et s’en allant ; sa taille encore un peu frêle d’enfant tout récemment grandie était droite comme un jonc, avec des épaules bien effacées ; une grâce saine et souple se dégageait de l’ampleur lente de ses mouvements.

Dès qu’elle avait tourné ce coin de rue, il s’en allait, sentant sa vie finie jusqu’au lendemain soir et ne sachant plus que faire de lui-même.

Alors il essayait de rentrer dans sa chambre et d’ouvrir ses cahiers de mathématiques, repris par un peu de raison, un peu d’inquiétude d’avenir.

Mais, est-ce qu’on travaille, les soirs attiédis de printemps, lorsqu’on a de l’amour en tête ?… D’ailleurs, tout le tentait, sa liberté, sa solitude, jusqu’à ce costume civil, acheté à cause d’elle, — ce costume qui facilitait les entreprises quelconques auprès de certaines belles empanachées, plus accessibles que Madeleine…