Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/205

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dysenterie lui était venue, tout de suite grave.

Et ce mal ne suit aucune marche qui puisse être prévue ; tantôt il choisit les plus forts et épargne les plus frêles, ou inversement ; tantôt il finit de tuer en peu de semaines, tantôt en plusieurs années. Quelques-uns repartent pour la France à peine touchés, pourrait-on croire ; mais le mal tout doucement continue de les ronger et, au bout de dix ans, de vingt ans, les achève. Tandis que d’autres, qui étaient bien moins vigoureux et qui semblaient plus pris, on ne sait pourquoi, guérissent.

Deux des matelots partis de France avec Jean étaient morts au bout d’une année. Il s’en allait très atteint, lui, le visage creusé, parcheminé ; au moindre effort et même rien que pour marcher un peu, ses membres se couvraient d’une sueur.

Et de temps en temps, à ses réveils, il avait eu l’impression — vite chassée, il est vrai — que c’était peut-être bien tard, ce retour…