Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/153

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De village en village, il semble que le caractère du vieux Japon s’accentue plus fortement.

Et toujours, après ces maisonnettes très vite disparues, la colonnade énorme des cèdres, la haute et étroite nef de branches reprend sa monotonie ; il y fait froid et presque noir.

Au début, la route était bonne ; elle est maintenant très défoncée, inégale, boueuse, et les ruisseaux qui d’abord couraient discrètement de chaque côté prennent des allures de torrents pour envahir la chaussée.

Nous nous élevons vers le plateau central par une pente insensible. Le pays, aperçu par échappées entre les troncs des cèdres, a changé de nature ; plus de champs cultivés comme du côté d’Utsunomya ; nous sommes au milieu des bois. Les arbres ressemblent à nos chênes, à nos ormeaux, l’automne les a déjà pas mal dépouillés et jaunis, et ils font l’effet de broussailles mourantes, à côté de ces alignements de cèdres droits qui les dominent de toute leur verdure éternelle.

Voici que peu à peu l’avenue obscure s’éclaire, d’une façon superbe et inattendue : c’est le soleil qui est à présent très bas, très près de disparaître, et qui pénètre par en dessous, jetant, par tous les intervalles des troncs énormes, ses gerbes d’or rouge.

Bientôt cela devient quelque chose de magique.