Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/184

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des obélisques et semblent amener d’en haut cette pâle lumière glissante qui fait briller doucement les choses splendides. En désordre, comme amoncelés, apparaissent des kiosques précieux en laque et en bronze, aux toitures luisantes, étoilées d’or et surmontées de lotus d’or. Ils ont les formes les plus étranges, les plus inusitées, les plus inconnues : les uns légers, d’une élégance raffinée et excessive ; les autres lourds, trapus, ayant pour angles des têtes d’éléphant et se ramassant sur eux-mêmes comme pour mieux enfermer des mystères. Cependant toutes les portes sont ouvertes, et on peut aller où l’on veut, il n’y a personne pour garder ces richesses. Par une ouverture basse, entre deux battants de cuivre ciselé, je me glisse au hasard dans l’un de ces kiosques qui est en bronze, en laque rouge et en laque d’or, et dont toutes les lignes architecturales sont des courbes tourmentées. Ce que je vois là dedans est pour moi inexplicable : une sorte d’armoire circulaire ornée avec un goût funèbre, ayant forme de gigantesque lanterne et ne reposant sur le sol que par un pivot central, comme si elle était destinée à tourner ; et deux dieux de grandeur humaine, à visage de vieillard couleur de chair cadavérique, assis sur des trônes, veillant sur cette encombrante chose ronde qui remplit presque entièrement le lieu où ils se tiennent. Tout dans cette magnificence