Aller au contenu

Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

regard ils recommencent leurs plongeons d’ensemble et remettent leurs bouts de nez par terre.

Nikko, le petit village lointain, qui déjà ouvre ses boutiques, étale au soleil ses peaux d’ours et de putois, disparaît bientôt tout au bout de l’avenue des cèdres sombre et majestueuse.

La nef infinie recommence, la nef de dix lieues de long. L’ombre y est glaciale. Mes coureurs filent à toutes jambes ; mon petit char s’en va bondissant. J’ai tellement froid, par cette vitesse, que de temps à autre je les arrête pour mettre pied à terre, et, malgré leur indignation, courir aussi.

Cette fois, nous avons pour nous la pente descendante, et puis la lumière, le grand jour. De sorte que nous ne mettons que cinq heures à accomplir ce long trajet, et encore le temps passe-t-il étonnamment vite, coupé par des haltes dans ces auberges de relais où nous prenons un peu de thé, un peu de riz, un peu de chaleur pour nos doigts, devant la braise des réchauds.

Vers midi, Utsunomya, la grande ville, reparaît.

Et Utsunomya est en fête : des illuminations préparées pour le soir, des lanternes partout.

C’est la fête des enfants, me disent mes coureurs ; et en effet, ils sont tous dehors, encombrant les petites rues noirâtres, tous bien peignés et en toilette de gala ; gentils et impayables, avec