Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/228

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vert aussi beau que celui des mousses, et un grand camélia sauvage, qui étale à profusion ses fleurs simples, semblables à des églantines roses. C’est dans un lieu paisible, à l’écart des bruits de la vie. Toute la colline est remplie de sépultures antiques et de pagodes cachées sous les arbres. Aux senteurs des plantes se mêle un religieux parfum d’encens dont le plein air est constamment imprégné, comme serait l’air d’un temple.

L’écriteau ne dit pas quelle est cette tête coupée qu’on est venu laver dans cette eau claire ; il dit seulement : « la tête ». — Mais tous les passants le savent. En ce pays, où l’on a dans le peuple le culte des légendes et des morts, inutile de préciser davantage…

Et moi aussi, du reste, bien qu’étranger, je le sais. Étant enfant, j’avais lu autrefois, en un manuscrit rare, cette histoire des « quarante-sept fidèles Samouraïs », me passionnant pour ces héros chevaleresques ; comme je lisais très peu, cela m’avait tout particulièrement frappé et je m’étais promis que, si le hasard m’amenait jamais au Japon, je viendrais rendre hommage à leur tombeau.

Précisément j’avais fait cette lecture par des journées de novembre belles et calmes comme celle d’aujourd’hui ; cette coïncidence d’une saison et d’un temps pareils rend plus complète l’association de mes petites idées d’autrefois, reve-