Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/97

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une chose apprise ; qu’elles font cela comme des automates, sans la moindre initiative personnelle. Si par hasard la mesure est perdue, il faut les arrêter et les faire repartir ; d’elles-mêmes, elles ne la rattraperaient jamais et continueraient de danser à contretemps. Cela s’explique assez bien, du reste, par la différence radicale entre nos musiques, entre nos rythmes et les leurs.

Leurs petites mains sont adorables sous les longs gants clairs. C’est que ce ne sont point des sauvagesses qu’on a déguisées là ; bien au contraire, ces femmes appartiennent à une civilisation beaucoup plus ancienne que la nôtre et d’un raffinement excessif.

Leurs pieds, par exemple, sont moins réussis. D’eux-mêmes ils se retournent en dedans, à la vieille mode élégante du Japon ; et puis ils gardent je ne sais quelle lourdeur, de l’habitude héréditaire de traîner les hautes chaussures de bois.

On danse avec un semblant d’entrain, et le plancher de la grande bâtisse légère tremble en cadence d’une manière inquiétante ; on a tout le temps présente à l’esprit quelque dégringolade possible et formidable sur la tête des messieurs qui sont dans les salons du rez-de-chaussée fumant des londrès ou jouant au whist pour se donner un air européen.

Une de mes impressions inattendues est d’en-