Page:Loti - L’Inde (sans les Anglais).djvu/33

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aux aguets ; tant de prunelles dilatées, épiant les moindres mouvements de l’ombre…

La coupée dans les arbres mystérieux se prolongeait toujours devant nous, aussi droite, paiement grise entre deux hautes parois noires ; on savait d’ailleurs qu’en avant, en arrière, de tous côtés, pendant des lieues et des lieues, l’impénétrable et inquiétant fouillis des branches étendait son oppression suprême.

Les yeux s’étaient habitués à la nuit, on y voyait comme on voit en rêve, et on distinguait parfois, sortant des fourrés pour aussitôt s’évanouir, d’imprécises bêtes rôdeuses au pas de velours.

Vers onze heures enfin, des petits feux apparurent ; les bords du chemin furent jonchés de longues pierres, de pierres de ruines, et, sur le ciel ténébreux, au-dessus de la cime des arbres, se dessinèrent les silhouettes géantes des dagahas : j’étais prévenu, et je savais que ce n’étaient point des collines, mais les temples de la ville ensevelie.

Là, nous trouvâmes le gîte pour la nuit, dans une auberge d’Indiens, au milieu d’un jardinet paradisiaque, dont notre lanterne, en passant, nous montra les fleurs.



Maintenant donc, le jour se lève et j’entends au-dessous de moi, dans la forêt, le réveil des oiseaux. Sur cette tour de temple, je suis entouré par les broussailles