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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/110

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Le soleil est déjà près de l’horizon occidental quand nous commençons à redescendre vers lesmarécages des bords du Haut Jourdain dans lesquels nous devons passer la nuit. Le bassin où ce fleuve coule, se déploie maintenant devant nous, immense et désert, entre deux chaînes de montagnes ; c’est une contrée de roseaux et de papyrus, magnifiquement verte, qui est redevenue, après des siècles d’abandon, aussi sauvage qu’une jungle préhistorique ; çà et là des flaques d’eau brillent dans ces bas-fonds comme des miroirs parmi les herbes, et au loin apparaît la tache bleue de ce lac de Houleh sur les bords duquel, dans l’antiquité biblique, tant de Rois s’étaient assemblés (Josué, XI, 1 à 10). Nous descendons par des pentes douces, dans une région de fenouils géants qui dépassent la tête de nos chevaux. De temps à autre, en avant de nous, s’entend la grêle musique d’un chalumeau arabe ; alors les fenouils s’entr’ouvrent pour donner passage à des petits bœufs noirs au front blanc et, après eux, fermant la marche, sort des ombelles jaunes et des feuilles en plumes légères, le musicien qui les mène, un Bédouin berger, coiffé du traditionnel voile brun dont les pointes sont arrangées en oreilles de bête. Plus nous descendons, dans la mélancolie grandissante du soir qui tombe, plus ces rencontres