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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/153

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apparaît un kiosque funéraire ; ou bien simplement le plus humble catafalque de quelque émir d’autrefois, au milieu de pieux drapeaux décolorés par les ans. Des débris des vieux âges surgissent aussi, de dessous la Damas de nos jours ; gigantesques colonnes encore debout, dont la tête dépasse les oppressantes petites toitures des rues et dont la base doit plonger dans le sol profond ; restes d’arcs de triomphe ou de temples superbes, contre lesquels sont venues s’appuyer des maisonnettes de terre, déjà âgées de plusieurs siècles àprésent ; confuses et énormes ruines, dont on aperçoit ou devine partout les fondations, sous la ville de boue rose qui a succédé aux splendeurs d’autrefois. Ville essentiellement bruyante que Damas. Le soir, quand s’apaisent les cris des hommes et ceux des nuées de martinets en tourbillons noirs dans l’air, les eaux courantes enflent partout leurs sons de cristal, les grenouilles entonnent dans l’oasis un concert immense, les chiens errants commencent leur ensemble nocturne — et toujours, aux heures consacrées par la coutume millénaire, les muézins chantent, dominent tout de la délicieuse tristesse de leur voix.