Aller au contenu

Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

désolé, aperçu à travers la pluie fouettante. Une sorte de neige fondue tombe sur nous sans merci, trempe nos vêtements et nous glace. Nous sommes transis jusqu’à l’âme, quand nous arrivons au hameau de Senghel où nous devons passer la nuit : groupe d’une douzaine de cubes de pierre que surmontent des petites coupoles ; groupe perdu, campé sur une hauteur et dominant de solitaires lointains. Nos tentes mouillées ne seraient vraiment pas habitables, par le grand vent qui souffle. Alors un patriarche arabe, sur notre demande, nous prête pour la nuit l’un de ces cubes voûtés dont l’ensemble compose sa maison ; il en possède quatre pareils, ouvrant par des ogives sur une sorte de cour intérieure qui est chaque soir remplie de moutons et de chèvres. Pour des nomades que nous sommes, c’est là un gîte inespéré, ce solide bloc de maçonnerie. Il est tout badigeonné de chaux blanche, avec des niches ogivales creusées çà et là dans l’épaisseur des murailles pour recevoir des narguilés, des buires ou des amphores. Quand nos tapis de campement sont étendus sur le sol et que la flamme d’un grand feu danse gaîment dans la cheminée profonde, nous éprouvons des impressions de chaude sécurité, au milieu de ce pays vide et noir ; protégés par les