Page:Loti - La Mort de notre chère France en Orient, 1920.djvu/124

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doxes, alors que les pauvres Turcs au contraire n’ont cessé d’être pour nous la tolérance même.

J’ai également dit et redit ma stupéfaction de voir des hommes cependant sérieux, sachant ce que les mots veulent dire, s’obstiner à prétendre que les Turcs nous avaient trahis. Mais la première condition pour trahir, n’est-ce pas d’avoir promis quelque chose ? Or, les Turcs que nous avaient-ils promis et que nous devaient-ils, s’il vous plaît ? Rien, ce me semble. Ne les avions-nous pas lâchés en Égypte en face des Anglais, lâchés en Tripolitaine en face des Italiens, dans les Balkans en face des Bulgares et des Grecs, — et cela, tout en les insultant à jet continu de la façon la plus regrettable. Vraiment, quel droit avions-nous de compter sur eux ? En dernier lieu, se voyant seuls sous la lourde patte du colosse russe, à la veille d’être écrasés et de perdre leur Stamboul, ils ont accepté de désespoir le secours de l’Allemagne pour sauver leur pays ; qui donc à leur place n’eût pas fait comme eux ? Avons-nous oublié que, dès 1913, le Président de la République française d’alors avait déjà promis Constantinople et les détroits à la Russie ? — faute colossale et sans explication possible, qui a été la cause première de tout notre désastre en Orient et qui a jeté les Turcs