Page:Loti - La Mort de notre chère France en Orient, 1920.djvu/244

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ments qu’ils traversent. Je n’ai jamais été le témoin de sentiments plus émotionnants que celui qu’a manifesté en ma présence la vieille mère d’Ahmed Ihsan bey. Introduite par son fils devant cette octogénaire vénérable, j’ai été reçue en ces termes : « En vous voyant, devant moi, je crois apercevoir la main protectrice de notre grand ami Pierre Loti et pour cet insigne bonheur je bénis le Seigneur. » Et saisissant son mouchoir, elle essuya les larmes qui coulaient de ses yeux. Toute la Turquie reconnaissante était représentée dans cette scène, si angoissante, par le geste sublime de cette auguste créature et par le martyre qui torture ce peuple !

Et maintenant je vais vous parler un peu de la situation politique.

Dès mon arrivée ici, j’ai pu avoir confirmation des manœuvres anglaises dont je vous ai parlé. Les agents britanniques ont exploité les incidents de Marach de manière à retourner l’opinion du monde entier contre les Turcs. Ils ont exagéré les faits, en ont inventé d’autres, associé leurs intrigues à celles des Grecs et des Arméniens, fait appel à tous les sentiments de haine, de vengeance et d’intérêts pour accabler vos amis, paralyser les efforts des