Page:Loti - La Mort de notre chère France en Orient, 1920.djvu/268

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nominalement commandant en chef des Armées alliées, c’est le général Wilson qui commande directement en Turquie d’Europe, et en fait — vous connaissez la manière anglaise — le général Wilson agit comme s’il était tout seul. Toutes les mesures de police, tous les appels à la population sont signés de son nom seul. Et à chaque pas, dans le monde, dans la rue, on vous arrête, en vous demandant : « Comment, ce n’est donc plus le général d’Espérey qui commande ? »

L’Anglais commande donc seul ici, et toute la population le regrette. On s’incline devant les Anglais brutaux, mais l’opinion n’est pas pour eux ; on ne les aime pas.

Voilà, Commandant, le résultat de quatorze mois de politique à bâtons rompus, sans unité de vues, sans direction ferme et surtout sans compréhension de l’intérêt de la France ; quatorze mois, pendant lesquels nous nous sommes laissé berner par les Grecs et les Arméniens ; quatorze mois de lutte anglo-française, alors que nous croyions à une collaboration avec les Anglais et que nous la pratiquions en ce qui nous concernait ; quatorze mois, au terme desquels l’erreur monumentale qui constitue notre sympathie pour tout ce qui n’est pas turc n’est pas encore redressée !