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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/314

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face, à lheure du Moghreb, pour un instant fugitif, avant la nuit qui ramène tout de suite le frisson du Nord.

Mais non, quand souvrirent ses contrevents le matin, il vit le ciel chargé et sombre : cétait le vent de la Mer Noire, sans espoir daccalmie.—Il savait du reste quà cette heure même, les jolis yeux de ses amies cloîtrées devaient aussi interroger le temps avec anxiété, à travers les grillages de leurs fenêtres.

Il ny avait pas à hésiter cependant, tout cela ayant coûté tant de peine à combiner, avec laide de complicités, payées ou gratuites, que lon ne retrouverait peut-être plus. À lheure dite, une heure et demie, en fez et le chapelet à la main, il était donc à Stamboul, à Sultan— Fatih, devant la porte de cette maison de mystère où quatre jours plus tôt elles lavaient reçu en odalisques. Il les trouva prêtes, toutes noires, impénétrablement voilées ; Chahendé Hanum, la dame inconnue de céans, avait voulu aussi se joindre à elles ; cétait donc quatre fantômes qui se disposaient à le suivre, quatre fantômes un peu émus, un peu tremblants de laudace de ce quon allait faire. André, à qui reviendrait de prendre la parole en route, soit avec les cochers, soit avec quelque passant imprévu, sinquiétait aussi de son langage, de ses hésitations peut-être, ou de son accent étranger, car le jeu était grave.