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Page:Loti - Les Derniers Jours de Pékin, 1901.djvu/299

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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

aux plafonds ; c’est un tapis d’une seule pièce, un tapis immense, de laine si haute et si drue que les pas s’y assourdissent comme sur l’herbe d’une pelouse ; mais il est tout déchiré, tout mangé aux vers, avec, par endroits, des tas de fiente grisâtre, — car les pies, les pigeons, les corbeaux ont ici des nids dans les ciselures de la voûte, et, dès que j’arrive, la sonorité lugubre de ce lieu s’emplit d’un bourdonnement de vols effarés, en haut, tout en haut, contre les poutres étincelantes et semi-obscures, parmi l’or des dragons et l’or des nuages.

Pour nous, barbares non initiés, l’incompréhensible de ce palais, c’est qu’il y a trois de ces salles, identiquement semblables, avec leur même trône, leur même tapis, leurs mêmes ornements aux mêmes places ; elles se succèdent à la file, toujours dans l’axe absolu des quatre villes murées dont l’ensemble forme Pékin ; elles se succèdent précédées des pareilles grandes cours de marbre, et construites sur les pareilles terrasses de marbre ; on y monte par les pareils escaliers, les pareils sentiers impériaux. Et par-