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MADAME CHRYSANTHÈME

Chrysanthème ira fermer sournoisement ces panneaux que j’ai rouverts, — quand soufflera certain vent plus frais qui monte jusqu’à nous, de la mer et de la rade profonde, avec l’extrême matin.

Auparavant elle se sera bien levée trois fois au moins, pour fumer : ayant bâillé à la manière des chattes, s’étant étirée, ayant contourné dans tous les sens ses petits bras d’ambre et ses toutes petites mains gracieuses, elle se redresse résolument, pousse des plaintes de réveil très enfantines et assez mignonnes ; puis sort de la tente de gaze, remplit sa petite pipe et aspire deux ou trois bouffées de la chose acre et déplaisante.

Ensuite : pan, pan, pan, pan, contre la boîte, pour secouer la cendre. Dans la sonorité nocturne, cela fait un bruit terrible — qui réveille madame Prune, c’était fatal. Et voilà madame Prune prise d’une envie de fumer, elle aussi, absolument suggestionnée ; — alors, à ce bruit d’en haut, répond d’en bas un autre : pan, pan, pan, pan, tout à fait pareil, exaspérant et inévitable comme un écho.