Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/190

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mousse, mille petites fleurs qui attiraient les premiers papillons blancs.

Ce printemps était presque sans amour, dans ce pays d’Islandais, et les belles filles de race fière que l’on apercevait, rêveuses, sur les portes, semblaient darder très loin au delà des objets visibles leurs yeux bruns ou bleus. Les jeunes hommes, à qui allaient leurs mélancolies et leurs désirs, étaient à faire la grande pêche, là-bas, sur la mer hyperborée…

Mais c’était un printemps tout de même, tiède, suave, troublant, avec de légers bourdonnements de mouches, des senteurs de plantes nouvelles.

Et tout cela, qui est sans âme, continuait de sourire à cette vieille grand’mère qui marchait de son meilleur pas pour aller apprendre la mort de son dernier petit-fils. Elle touchait à l’heure terrible où cette chose, qui s’était passée si loin sur la mer chinoise, allait lui être dite ; elle faisait cette course sinistre que Sylvestre au moment de mourir avait devinée et qui lui avait arraché ses dernières larmes d’angoisses : sa bonne vieille grand’mère, mandée à l’Inscription de Paimpol pour apprendre qu’il était mort ! — Il l’avait vu très nettement passer,