Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/36

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Vraiment il n’existait pas ailleurs, dans tout le pays de Paimpol, une autre bonne vieille comme elle, pour trouver des choses aussi drôles à dire sur les uns ou les autres, ou même sur rien du tout. Dans cette lettre, il y avait déjà trois ou quatre histoires impayables, — mais sans la moindre malice, car elle n’avait rien de mauvais dans l’âme.

L’autre, voyant que les idées ne venaient plus, s’était mise à écrire soigneusement l’adresse :

À monsieur Moan, Sylvestre, à bord de la marie, capitaine Guermeur, — dans la mer d’Islande par Reickawick.

Après, elle aussi releva la tête pour demander :

— C’est-il fini, grand’mère Moan ?

Elle était bien jeune, celle-ci, adorablement jeune, une figure de vingt ans. Très blonde, — couleur rare en ce coin de Bretagne où la race est brune ; très blonde, avec des yeux d’un gris de lin à cils presque noirs. Ses sourcils, blonds autant que ses cheveux, étaient comme repeints au milieu d’une ligne plus rousse, plus foncée, qui donnait une expression de vigueur et de volonté. Son profil, un peu court, était très noble, le nez prolongeant