Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/68

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chêne de futaie, et tournant avec une grâce à la fois légère et noble, la tête rejetée en arrière. Ses cheveux bruns, qui étaient en boucles, retombaient un peu sur son front et remuaient au vent des danses ; Gaud, qui était assez grande, en sentait le frôlement sur sa coiffe, quand il se penchait vers elle pour mieux la tenir pendant les valses rapides.

De temps en temps, il lui montrait d’un signe sa petite sœur Marie et Sylvestre, les deux fiancés, qui dansaient ensemble. Il riait, d’un air très bon, en les voyant tous deux si jeunes, si réservés l’un près de l’autre, se faisant des révérences, prenant des figures timides pour se dire bien bas des choses sans doute très aimables. Il n’aurait pas permis qu’il en fût autrement, bien sûr ; mais c’est égal, il s’amusait, lui, coureur et entreprenant qu’il était devenu, de les trouver si naïfs ; il échangeait alors avec Gaud des sourires d’intelligence intime qui disaient : « Comme ils sont gentils et drôles à regarder, nos deux petits frères !… »

On s’embrassait beaucoup à la fin de la nuit : baisers de cousins, baisers de fiancés, baisers d’amants, qui conservaient malgré tout un bon air