l’autre côté, du côté de la campagne, — et décidément je m’échappai.
Je traversai d’abord sans m’arrêter la première futaie de chênes pour aller m’enfoncer dans un autre bois un peu plus lointain, en pleine brousse, écartant les ajoncs et les bruyères ; je dérangeais en passant tout un petit monde grisé de chaleur, qui faisait la sieste, des sauterelles roses ou bleues, de grosses mantes vertes qui s’abattaient affolées sur moi ; je faisais fuir des serpents et de gros lézards ; un hibou, épouvanté d’une visite si inaccoutumée, s’éleva lourdement de son vol soyeux pour retomber bientôt, étourdi par trop de lumière. Je jouissais de me dire que personne ne me savait là, si loin, à cette heure accablante, et qu’on devait s’inquiéter de moi, m’appeler, me chercher.
Enfin j’arrivai à une clairière, où je m’arrêtai saisi de recueillement et d’extase, tant le lieu me parut idéalement sauvage ; de sombres chênes-verts l’entouraient de toutes parts ; il y avait des buissons d’églantines roses chargés de fleurs, des chèvrefeuilles, des touffes d’ancolies, et je cueillis des orchidées blanches qui embaumaient ; par terre, c’était un tapis sans doute inviolé de lichen et de mousse. On sentait l’odeur des marjolaines, du thym, du serpolet, surchauffés