Les autres années, la joie de mon premier réveil dans cette chambre était de me sentir enfin arrivé dans le pays où les libres vacances allaient commencer sous le beau ciel bleu. Mais cette fois non, la joie, la vraie joie fut de me dire : « Est-ce vraiment possible ? Maman aussi est venue, maman est là ! Et je vais pouvoir lui montrer la réalité de ce qu’elle n’a jamais vu, les vallées, les montagnes, l’emmener avec moi partout !… »
En effet, pendant cette saison qui fut radieuse, j’abandonnai beaucoup mes compagnons habituels, la bande des petits Peyral et celle des petits paysans ahuris et dociles, pour me promener avec maman, mais rien que nous deux en partie fine, et je la conduisis, par les sentiers de chèvres qui m’étaient familiers, dans les fourrés épais bordant les rivières ou sur les sommets d’où sa vue ravie dominait les profonds lointains ; rien ne me charmait comme de lui faire ainsi, à elle toute seule, les honneurs de tout mon domaine d’imaginaire