Page:Loti - Prime Jeunesse, 1919.djvu/8

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UN COURT PRÉLUDE

Avec une obstination puérile et désolée, depuis ma prime jeunesse, je me suis épuisé à vouloir fixer tout ce qui passe, et ce vain effort de chaque jour aura contribué à l’usure de ma vie. J’ai voulu arrêter le temps, reconstituer des aspects effacés, conserver de vieilles demeures, prolonger des arbres à bout de sève, éterniser jusqu’à d’humbles choses qui n’auraient dû être qu’éphémères, mais auxquelles j’ai donné la durée fantomatique des momies et qui à présent m’épouvantent… Oh ! quand j’aurai fait ma plongée dans le néant, les mains pieuses chargées d’exécuter mes volontés suprêmes ne se lasseront-elles pas de visiter