Page:Loti - Roman d’un enfant, éd. 1895.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
LE
ROMAN D’UN ENFANT


I


C’est avec une sorte de crainte que je touche à l’énigme de mes impressions du commencement de la vie, — incertain si bien réellement je les éprouvais moi-même ou si plutôt elles n’étaient pas des ressouvenirs mystérieusement transmis… J’ai comme une hésitation religieuse à sonder cet abîme…

Au sortir de ma nuit première, mon esprit ne s’est pas éclairé progressivement, par lueurs graduées ; mais par jets de clartés brusques — qui devaient dilater tout à coup mes yeux d’enfant et m’immobiliser dans des rêveries attentives — puis qui s’éteignaient, me replongeant dans l’inconscience absolue des petits animaux qui viennent de naître, des petites plantes à peine germées.

Au début de l’existence, mon histoire serait sim-