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VIE DE MÉLÉAGRE


Méléagre naquit dans une cité blanche et verte, parmi les palmiers, les eaux vives, à Atthis, nous dit-il. Or, il ne s’appelait pas Méléagre, et Atthis est une ville qui n’a jamais existé.

Il était Syrien, il était Israélite, comme Heinrich Heine, à qui il faut le comparer. On pense qu’il se convertit de bonne heure aux belles déesses de l’Hellas, à la langue de Sapphô et d’Alcée. Les derniers poètes survivants ne virent pas en lui un barbare, mais ils l’accueillirent parmi eux, comme fit Artémis pour ce divin khéroub qu’elle rencontra un matin sur les pentes boisées du Liban lorsqu’ayant chassé très longtemps elle s’était presque égarée. Les Grecs de Byblos racontaient que l’Ange lui avait paru quelque enfant du Cygne et de Kypris, et qu’au seul regard de la déesse, il l’avait suivie comme la lumière.

Raphaël, ou David peut-être, ou Jean, ainsi s’appela Méléagre. La vallée du Hiéromyces, qui est aujourd’hui le Yarmouk, le vit naître, cela est possible. C’est là qu’il put lire la Bible et garde du Sir Hasirim assez de grâce et de volupté pour donner aux Charites d’Ionie toute la langueur orientale. Quand il eut passé l’enfance, il partit pour l’île de Tyr et y vécut toute sa jeunesse.