Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 11.djvu/136

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dance d’un homme s’abritait tout entière sous les peaux de bouc de la tente, assemblée autour du foyer, protégée par son Chef, son Maître, son Père.

Alors, en effet, et justement ! le maître de la tente avait le droit de dire : « J’admets chez moi cette femme et non cette autre. Je gouverne ceux que je défends. » — Ce qu’un tel état social devait engendrer à l’époque moderne, on le voit aujourd’hui par le spectacle des sociétés nomades de l’Asie ou des pays maures qui sont tombées, une à une, sous la main des peuples libres. De même qu’au sommet de l’échelle nous avions trouvé les libertés nuptiales, de même, au dernier point de la décadence, nous trouvons la puissance paternelle à son comble : et cela n’est pas moins frappant.

Aujourd’hui, la famille se désagrège dès la naissance. Dans les milieux bourgeois, l’enfant vit jusqu’à sept ans avec ses bonnes, jusqu’à seize ans avec ses pions et, ensuite, avec… qui vous savez. De quel droit ceux qui l’ont exilé d’abord dans la lingerie, puis emprisonné dans l’atroce internât, avec la menace des maisons de correction, s’il résiste, de quel droit viendraient-ils, ensuite, non pas même discuter, mais briser d’un seul geste l’inclination de cet enfant, devenu homme, lorsqu’elle se manifeste si naturelle, si tendre, et vraiment si morale au sens