Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/123

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Touni dormait toujours, la tête inclinée, le corps presque nu dans sa mousseline teinte.

La pourpre de la lune encore sur l’horizon arrivait jusqu’à elle par-dessus la mer. Sa lueur éclatante et fatale la baignait d’une flamme qui semblait immobile ; mais lentement le reflet s’élevait sur l’Égyptienne : une à une, ses boucles noires apparurent, et enfin brusquement sorti de l’ombre, le Peigne, le Peigne royal désiré par Chrysis, le Peigne éclaira sa couronne d’ivoire, atteint par le rayonnement rouge.


Alors le sculpteur prit entre ses mains le doux visage de Touni et il le tourna vers le sien. Elle ouvrit ses yeux qui grandirent :

« Démétrios !… Démétrios… Toi !

Et ses deux bras s’abattirent sur lui.

« Oh ! murmura-t-elle d’une voix qui chantait avec son bonheur, oh ! tu es venu, tu es là… Est-ce toi, Démétrios, qui m’éveilles dans tes mains ? Est-ce toi, fils de ma déesse, ô Dieu de mon corps et de ma vie ? »

Démétrios fit un mouvement de recul. Elle s’approcha d’un seul élan.

« Non, disait-elle, que crains-tu ? Je ne suis pas pour toi celle que l’on redoute et que la toute-puissance du Grand-Prêtre environne. Oublie mon nom, Démétrios. Les femmes n’ont plus de nom dans les bras des amants. Je ne suis plus