Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/31

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La jeune fille alterna, d’une voix douce et lente :

« Mes cheveux sont comme une rivière infinie dans la plaine, où le soir enflammé s’écoule. »

Et elles chantèrent l’une après l’autre :


— Tes yeux sont comme des lis d’eau bleus sans tiges, immobiles sur des étangs.

— Mes yeux sont à l’ombre de mes cils comme des lacs profonds sous des branches noires.


— Tes lèvres sont deux fleurs délicates où est tombé le sang d’une biche.

— Mes lèvres sont les bords d’une blessure brûlante.


— Ta langue est le poignard sanglant qui a fait la blessure de ta bouche.

— Ma langue est incrustée de pierres précieuses. Elle est rouge de mirer mes lèvres.


— Tes bras sont arrondis comme deux défenses d’ivoire, et tes aisselles sont deux bouches.

— Mes bras sont allongés comme deux tiges de lis, d’où se penchent mes doigts comme cinq pétales.


— Tes cuisses sont deux trompes d’éléphants blancs, qui portent les pieds comme deux fleurs rouges.