Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/129

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main qui presse la vôtre, c’est votre sang qui circule. Si vos yeux s’éclairent, c’est mon propre désir, s’ils se ferment, c’est ma volupté, qui vous envahissent et qui les animent. Le physique de l’amour charnel est anéanti par l’amour lui-même comme la graine éclate et tombe en poussière à l’ombre de l’arbre qu’elle a créé. Sentez-vous, Psyché, sentez-vous que le toucher de la bouche à la bouche, si brûlant soit-il, n’est plus rien, sous le miracle soudain d’immatérialité qui s’éveille autour de nous ? Et me comprenez-vous enfin : l’amour ne saurait créer d’autres prodiges que celui-là : une vierge est une amante dès que le baiser la touche. L’étreinte lui réserve la même ivresse, la même ! exaltée au centuple mais identiquement pure.

— Oh ! pourquoi me parlez-vous ainsi ? »

Ils marchaient de nouveau, côte à côte, lentement, le long des buissons encore bruns dont toutes les brindilles poussaient une pointe verte.

À leurs pieds, l’herbe neuve, plus hâtive que les arbres, poussait le long des fourrés, pénétrait les branches basses. Les troncs eux-mêmes avaient un aspect verdissant et heureux. Les rameaux bleus luisaient sous la lumière frisante. Les écorces étaient molles de sève. Des respirations aériennes soulevaient les cimes souples des frênes vers le ciel.

Elle soupira, sans forces :

« Pourquoi m’aimez-vous ? Pourquoi entre