Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/164

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Affectueusement, elle lui ferma la bouche.

« La statue du poème n’est donc pas habillée ?

— Non.

— Alors, ce n’est pas la statue du Jour ; c’est à peine celle de la Nuit. »

Mais elle ne put murmurer sa phrase sans qu’une ondulation chaude comme un souvenir voluptueux ne fît monter en elle et jusqu’à sa nuque la réponse du corps à l’esprit.

Aimery avait ressenti le mouvement dans l’étreinte légère de son bras.

« Et pourquoi, dit-il, ne serait-ce pas l’image du Jour ? L’amour seul se plaît aux ombres. La beauté est le don du soleil. Viens. Sais-tu ce qu’enferme cette porte ? C’est le jardin secret du parc. La voici ouverte et reclose derrière nous. Où nous sommes arrivés, personne au monde ne peut plus te suivre ni t’épier. Il n’est pas de maison forte ni de chambre verrouillée qui soit mieux défendue que ce labyrinthe vert entouré de murailles. Voici la source de la rivière qui traverse tout le domaine. Le soleil est brûlant. C’est presque un jour d’été… »

Psyché ne lui laissa pas le temps d’achever. Non. C’était pour elle une chose impossible. Elle le suppliait de n’y plus penser. Une inquiétude aimante animait ses yeux tandis qu’elle lui parlait avec des caresses, les mains aux joues, la bouche presque sur la bouche : elle ne voulait rien lui refuser, et surtout ne lui faire aucune peine, mais se