Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/148

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voirs français sur le romantisme, m’a laissé entrevoir que je pourrais être plus tard un grand écrivain.

Et pourquoi pas, après tout ? Depuis le commencement de l’année, tous mes devoirs français, sans exception, ont eu les meilleures notes données. Dans aucun devoir, aucun élève ne m’a dépassé. Il me semble que pour une année de rhétorique c’est un bon présage.

J’écris avec la plus grande facilité. J’ai quelquefois des mots heureux, des phrases bien tournées (je peux bien dire cela ici puisque ce journal ne doit être lu que par moi), et, en outre, j’aime beaucoup à écrire. J’écris même avec passion, comme m’a dit M. Dietz dans mon dernier bulletin. Quand j’ai un sujet qui m’intéresse et que je sens que je le traite bien, j’ai la fièvre, je ne tiens plus en place, je suis tout haletant, et je me remue comme la sibylle de Cumes sous l’inspiration.

Il m’est venu à l’esprit d’écrire ceci en lisant le livre de Taine sur La Fontaine : « Voilà, me suis-je dit, un grand écrivain et un grand penseur qui avait la passion de La Fontaine et qui s’est fait un nom en écrivant un livre sur son idole. De même pour Renan sur Jésus ; de même pour Mézières sur Shakespeare ; de même pour France sur Racine ; de même pour bien d’autres. Eh bien, moi qui ai pour Hugo l’admiration la plus complète, la plus entière, la plus enthousiaste que son grand nom ait jamais fait naître, moi qui serai