Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/50

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leur goût à toute leur génération. Et là-dessus je suis absolument de son avis. La Damnation de Faust n’était pas moins belle en 1846 que maintenant. En 1846, elle est tombée à la première. En 1887, on en bisse tous les morceaux. Ronsard, au XVIe siècle, était porté aux nues ; au XVIIe, il était relégué au sixième dessous. Au XVIIIe, il était oublié. Puis vint le XIXe siècle, qui en fit le premier des poètes érotiques français. Il n’a pourtant pas changé.

« Maintenant, me dit Georges, on est dans le naturalisme à outrance. Mais tu vois déjà dans les journaux un mouvement se produire en sens contraire, et il est probable que nous allons avoir une école tout idéaliste[1]. »

Puis Georges me cita le verset célèbre de la Bible : « Creavit mundum et tradidit eum disputationibus hominum. » Et c’est là-dessus que la conversation s’engagea.

« La Bible, me dit Georges, est un livre admirable, mais je comprends cependant que les catholiques n’en recommandent pas la lecture, car cela peut être un livre dangereux si on prend tout au pied de la lettre. S’il y a peu de livres qui aient fait commettre plus de belles actions, il y en a peu aussi qui aient fait commettre autant de bêtises. Le Dieu de la Bible n’est pas une grande

  1. Prédiction juste.