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C’était une accablante journée d’été. J’avais déjeuné à l’hôtel de Paris, et pour aller de Las Sierpes à la rue San-Fernando, « à l’heure où il n’y a dans les rues que les chiens et les Français », j’avais cru mourir de soleil.

J’entrai, et j’entrai seul, ce qui est une faveur, car vous savez que les visiteurs sont conduits par une surveillante dans ce harem immense de quatre mille huit cents femmes, si libres de tenue et de propos.

Ce jour-là, qui était torride, je vous l’ai dit, elles ne mettaient aucune réserve à profiter de la tolérance qui leur permet de se déshabiller à leur guise dans l’insoutenable atmosphère où elles vivent de juin à septembre. C’est pure humanité qu’un tel règlement, car la température de ces longues salles est saharienne et il est charitable de donner aux pauvres filles la même licence qu’aux chauffeurs des paquebots. Mais le résultat n’en est pas moins intéressant.

Les plus vêtues n’avaient que leur chemise autour du corps (c’étaient les prudes) ; presque