un acte charitable ensuite, par la tentation peut-être non moins vive de pénétrer à l’heure des toilettes nocturnes parmi les filles de ballet. Car, pour une vieille demoiselle, veiller au salut de son âme en s’instruisant des dessous galants, c’est le programme du bonheur parfait.
Restée seule et bordée dans son petit lit frais, la blanche Aline se sentit prise d’une émotion insoutenable. Elle essaya de se calmer d’abord sur le côté droit, puis sur le côté gauche, sur le dos, sur la poitrine, assise, accroupie, étendue, épanouie ou recroquevillée ; mais elle avait la fièvre dans toutes les positions et instinctivement elle reculait jusqu’au bord de son matelas comme pour laisser place auprès d’elle à un visiteur mystérieux.
Bien avant l’heure, elle se leva, chaussa des mules, ouvrit les rideaux et regarda la lune entrer jusqu’au fond de la longue chambre.
La nuit brillait, tiède et légère. Par la fenêtre ouverte, Aline distinguait dans le lointain, au delà des pelouses brumeuses et des bois immobiles, la terrasse blanche des communs où Mirabelle lisait sa lettre
— Que va-t-elle penser de moi ? se dit la petite en rêverie. Viendra-t-elle ? Peut-être que non…